Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Pays Verti Prose posée perd ce qui casse

Drosera Pitre_ Pure pître 3

Junin
Drosera Pitre_ Pure pître 3

Midi : la sirène sonne, et pas encore habitué au ”quart d'heure vestiaire“, m'y pointe lorsque tout le monde le quitte en lançant des «a’t’al’ ! ».

J'essaie de me grouiller pour espérer esquiver l'inévitable queue qui va s'accumuler devant le camion-resto dans les dix minutes qui suivent.

Je me jette dehors en trottinant, longeant sur 100 mètres la rue Ampère et m'arrêtant devant un caltar blanc d'ou une fine colonne odorante s'échappait par volute : merguez/frites, américain, andouillettes/pates ou simple jambon beurre ?

Opte comme d'habitude pour le traditionnel 'guez/frites dégoulinante de graisse: je sors un « comme d'hab' » au cuistot suant à grosse gouttes. Regard interrogateur pour m'éviter la honte de me le redemander. Je lâche ma commande avec un « t’as raison, ‘vais en changer … » l’assorti d'une Kro fraiche et m'installe sous la tente gonflée par le vent.


Autour de moi des camionneurs, manutentionnaires, employés en majeur partie âgé de la quarantaine, causant à coup de gros rouge sur les vacances qu'ils ont eu ou qu'ils vont bien finir par prendre en fin de semaine, des faces blanchâtres réjouies résonnent les paroles des bronzés tristes à quelques quinzaine de jours d'intervalle. Seul à tailler le bout de gras avec ma saucisse, j'échange mon point de vu avec les frites luisantes et noie les restes de rasade de houblon light; considérant vaguement les mornes péripéties d'une vie d'usine...

Ecœuré de graisse, je remballe et plie mes restes dans leur papiers pour tout jeter incognito et retourne au magasin en grandes enjambés pour rejoindre mon équipier de pétanque sous le cerisier japonais.

Jean-jean, de retour du Midi, racontait, heureux, sa caravane Challenger flambant neuve et son exaspérante Chantal enceinte jusqu’aux dents, vantant l'avantage indéniable de confort de l'un abolissait les caprices sentencieux de l'autre. En pleine forme car enfin libérer de sa grosse, il ratatinait les maigres points que l'on s'était évertués à accumuler. Je me suis mis à cramer ma boulette alors qu'il restait dix minutes pour faire la demi, et en fouillant mes poches pour trouver de quoi faire un carton, suis retombé sur l'espèce de recette que j'avais dégotté au dos d'une boîte de vitamine pour canaris.

Sans comprendre vraiment pourquoi une recette pour animaux pouvait attirer mon attention grillée par la mécanique débilitante de la préparation de commande, je me remis à lire la listes d'ingrédients en caressant le relief des lettres d'encre … Il apparaissait comme un luxe ridicule que de préparer un repas élaboré pour des piafs bariolés.

Rédigé en espagnol, elle m’apparaissait incantatoire et loin des délires markétings qui pullulent sur le moindre carton d'emballage... « Hé mec ! À toi de jouer! », Lionel s'approcha de moi alors que je remballais le bout de carton dans ma poche sans avoir trouvé le moindre filtre à faire, « nan, j'arrête...il m'énerve tonton Jean-Jean. Dis moi t'aurais pas un ton-car, stepl' ? »

  • T'en avais un dans la main à l'instant…

  • Nan, je peux pas l'utiliser...

  • Genre, t’as des trucs à cacher ??....tiens mec »

  • en fait, c'est un genre de recette de cuisine que j'ai trouvé dans une boîte de médoc pour canarie...tu parle l’espagnol ?

  • Nan, j'suis portugais.....Mais j'ai entendu dire que certain piochait dans ces médoc pour picorer sans plus de façon que de les arranger façon cuistot : pas vrai JM? »

La silhouette avachie contre le mur en bac acier releva le nez en tirant sur ses grandes échasses, mais ne répondit rien et retourna à la contemplation du jeu des ombres des branches du seul arbre sur la poussière.

« Qu'est-ce que tu veux dire ?

  • lâche l'aff ' ...Dégrouille, c'est bientôt la fin d'la pause »

En fin de cône, j'en viens à me demander ce qui peut bien faire du père Jean-Mi un robot à la chaine, et un égaré à la ramasse une fois le temps de la pause sonnée.



*****


De retour dans l'entrepôt surchauffé, m'accueille Givette, paquet-poulette dans sa blouse blanche et son maquillage irréprochable pour une employée de cabinet dentaire, mais un peu exagéré pour travailler à hui-clos.

Elle nourrissait 6 cartons paillant du même produit et repart en trottinant vers d'autres boîtes en attente, dégomme 3 commandes en même temps d'une main experte et cadencée par vingt ans de pratique; tandis que ma propre commande se perd dans des gestes à la systémacie paranoïaque.

Elle me regarde en souriant et s'approche de ses petites jambes varicées par de longues journées à galoper d'antihistaminique pour vache aux cachets gériatriques pour chat – robot mégère de moins de cinquante ans, tendant son bras au devant du carton telle une danseuse sur sa barre d'entrainement ; elle en est encore jolie, ancienne femme-fleur parfumée de Jasmin aux sourire inextinguible.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires